
« J’ai fait l’EFAP (Ecole des nouveaux métiers de la communication). J’avais tenté une année de droit, mais au troisième cours, quand on nous a dit “vous n’êtes pas ici pour penser, mais pour appliquer”, je me suis dit “mon dieu, ça n’est pas pour moi”. J’avais intégré l’EFAP avec le rêve de devenir conceptrice-rédactrice (de slogans, d’accroches...). Mais c’est un parcours semé d’embûches. Le monde des agences est très fermé.
J’ai fait de petits stages. Et en dernière année, j’ai intégré une grande agence pour mon stage de fin d’études. Mais j’ai déchanté. J'ai réalisé que ces milieux étaient trop compétitifs pour moi : peu d’entraide, peu de bienveillance. Pourtant, les projets étaient exceptionnels. Il y avait un pôle créa, un pôle presse, on ne manquait de rien, on faisait des shootings à des milliers d’euros…
J’avais envie de me glisser sous le bureau, de devenir invisible. Je me disais : “‘Tu as toujours rêvé de ça, tu peux pas te plaindre”. Mais ça ne me correspondait pas. Du coup, à la fin du stage, j’ai cherché ailleurs. Ca a pris du temps, et je commençais à avoir peur. Mais un jour, une entreprise m’a répondu. Elle mettait en relation des candidats et des métiers de bouche, et cherchait un.e Chargé.e de com.
Ca a matché direct ! J’ai adoré l’ambiance “petite startup”. En plus, j’ai toujours été passionnée par le monde de l'artisanat. Mon père est artisan, et le côté “ripaille” fait partie des mœurs de ma famille. Les premiers mois, c’était le rêve absolu. Je rencontrais de grands chefs, j’allais sur des événements de dingue, je goûtais plein de choses exquises.
Puis j’ai déchanté sur le côté startup. J’avais l’impression de vivre un truc exceptionnel, mais j’étais partagée. D’un côté, je me disais “c’est dingue !”, et de l’autre, chaque fin de mois était un combat : les retards de salaire s'accumulaient... Et le monde de la gastronomie, si tu n’en fais pas partie, c’est dur d’y rentrer. Quand tu côtoies les hautes sphères, ce sont des personnalités inaccessibles...
J’étais un peu comme une boxeuse : je me prenais coup sur coup sans me rendre compte que j’étais sonnée. Un jour, j’ai explosé en larmes au téléphone avec mes parents. Mais malgré ça, j’ai tenu, car je voulais un back-up. J’avais trop peur du chômage. Aux yeux des gens, tu es une assistée qui profite des aides et passe ses journées à se tourner les pouces sur ton canap.
Mais au bout d’un moment, j’ai craqué. Je suis partie. Et mon chômage a été une période salvatrice ! Je me suis retrouvée. Depuis un an trottait dans ma
tête : “Je n’ai jamais trop aimé le travail d’équipe, j’ai toujours été très indépendante dans toutes mes expériences. J’aime le mentoring, mais je n’aime la hiérarchie. J’aime apprendre des gens, mais avoir un manager pour en avoir un, franchement… non !”
J’ai alors décidé de me lancer. J’ai créé une entreprise de conseil en communication pour les pro des métiers de bouche et des métiers du vin. Ca a pris tout de suite. J’ai eu mon statut en janvier 2019, et j’ai signé mon premier client au bout de 3 semaines ! J’ai très vite pu me sortir un salaire.
Je fais de la production de contenu, de la stratégie éditoriale, de la communication, de l’organisation d’événements... J’aborde les choses avec beaucoup de sérénité. Si ça ne marche plus assez bien et que je suis contrainte de revenir au salariat, j’y retournerai. Mais dans tous les cas, je garderai ma boîte. Et puis j’ai d’autres idées de boîtes dans la gastronomie ! Mon rêve, c’est de mettre la main à la pâte au sens propre.
Malgré les lendemains incertains, j’ai quand même réussi à me créer mon job de rêve. Si j’ai envie de me prendre tous les soirs de la semaine, ou faire le marché le mercredi matin, je peux. Parfois, je bosse le week-end, parfois je bosse jusqu’à 22h… Mais je le choisis. Les opportunités se créent. Il faut qu’on arrête de dire “J’ai eu de la chance”. Il faut accepter que si on y arrive, c’est parce qu’on
travaille ! »