
« Je suis né en 1981. J’ai quitté mon petit village du Loir-et-Cher à l’adolescence pour faire mon lycée à Blois, un IUT Techniques de commercialisation à Tours, puis une Ecole de commerce à Toulouse. Dans le Loir-et-Cher, il y a pas mal de châteaux abandonnés. J’adore la pierre, les beaux lieux… J’ai décidé d’être Asset manager. J’achetais, valorisais et vendais des immeubles. Je vivais ma jeunesse de golden boy parisien.
J’étais un créatif dans la peau d’un gérant. Je rêvais de monter un fond solidaire où on rachèterait des îles pour en faire des éco-lodges, des endroits éco-responsables… Au Monténégro, j’avais vu plein de Palais vénitiens en ruine. Je m’étais dit que j’allais racheter des vieux palais, les retaper, et en faire des hôtels de charme… On se moquait de moi : “Damien, le farfelu, le mec qui veut nous faire acheter des îles”...
Après 7 ans, acheter des immeubles de bureau pour les louer à Total me lasse. Avec ma femme, on revend notre appart parisien et on part 1 an en tour du monde. On rentre en France avec un bébé. Je cherche alors un job dans ce que je faisais avant… mais impossible de remettre un costard et une cravate ! On quitte Paris pour Lyon en 2012. Je crée une première boîte, au croisement de mes passions et de mes compétences en finance.
Je souhaitais racheter de vieux hôtels particuliers à Lisbonne, où l’immobilier ne ne valait plus rien. Les états de la Méditerranée étaient menacés de faillite, et dnc l’immobilier s’était crashé. Par ailleurs, à Harlem, c’était les prix de Lyon ! J’étais aussi sous le charme d’Oslo, de ses vieilles demeures en bois. Je voulais créer une collection d’espaces de co-living partout dans le monde, des collocs un peu dingues pour les digital nomads.
Un investisseur m’a aidé pour la première phase, puis j’ai fait une levée de fonds pour acheter les immeubles et les retaper : mais je n’ai pas réussi. Au moment où je tournais la page de ma boîte ratée, et où j’arrivais au bout de mon chômage, la mairie de Paris sort un concours “Réinventer Paris”. Le but : donner une autre vie à de vieux bains-douches par exemple, ou à d’autres lieux abandonnés de la sorte.
J’ai répondu à ce concours en candidat libre. J’ai dû monter une équipe (architectes, opérateurs) et créer un concept (comment innover, repenser le vivre ensemble…). On était sur une proposition co-living et d’habitats participatifs. On a perdu, mais ça m’a permis de structurer mon activité dédiée à la réponse à ces appels à projets urbains
innovants : Urban project. On a gagné deux concours similaires à Lyon, en 2015 et 2016.
On va transformer une Eglise sur les pentes de la Croix-Rousse en co-working ! Par la suite, j’ai rencontré une architecte qui avait repéré une vieille menuiserie libre dans un quartier en friche, et qui avait envie de créer un tiers lieux. Avec un troisième associé, on a monté la Commune à Lyon, un food-court tremplin pour jeunes chefs cuisiniers qui veulent devenir chefs, mais qui n’ont pas réussi à obtenir de prêts de la banque.
Sur les 19 chefs qui sont venus tester leurs concepts à la Commune, 7 ont ouvert leurs établissements aujourd’hui. On a une salle de spectacle au fond, 150 places assises. On a organisé 170 événements : battle de dessinateurs, concerts dans le noir… Jusqu’à fin 2018, j’étais dédié à la Commune et j’avais mis Urban project, qui venait de démarrer, entre parenthèses pour vivre cette nouvelle aventure.
Mais début 2019, j’ai décidé de me remettre sur Urban project. On développe à côté un studio de création. Par exemple, si des promoteurs nous contactent pour nous annoncer que la Mairie souhaite créer un tiers lieu dans un lieu à l’abandon, notre rôle, c’est d’imaginer des concepts. Et après ça, soit on les met en relation avec des gens, soit on leur propose des concepts qui sortent de notre studio et qu’on implante nous même dans les lieux !
On a aussi travaillé sur un immeuble en pierre de taille et bois dans Lyon, au sein duquel il y a un atelier de menuiserie… C’est un bâtiment splendide. Je suis super fier de mes lieux, et j’adore ma liberté : être créatif, penser hors du cadre, faire différemment les choses. Sentir le soir que ce que tu fais va dans le bon sens, même si ça ne change pas le monde, c’est avant tout un kiffe perso. »